« Mon test IST »

Urps biologistes idf

Interview de Michel SALA
secrétaire général de l’Union Régionale des Professionnels de Santé (URPS) Biologistes Île-de-France

La première chose est de définir le périmètre du programme. Le dépistage du VIH est bien organisé depuis la mise en place de VIH test et les actions complémentaires indispensables des associations, et du balisage effectif du parcours de soin des cas positifs dépistés. Malheureusement, pour les autres IST, les actions semblaient moins définies.

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« Mon test IST » concerne tous les assurés et leurs ayants droit ainsi que les bénéficiaires de l’aide médicale d’État (AME).

Il suffit de se présenter à un laboratoire de ville ou hospitalier et de demander à bénéficier d’un dépistage dans le cadre de « Mon test IST ». Un auto-questionnaire sera à remplir pour définir les IST à dépister et les prélèvements adaptés.

L’idée de proposer un système de dépistage des IST facile, accessible et gratuit, est donc issu de constats épidémiologiques effectués par Santé Publique France (SPF) montrant que depuis 2018, l’incidence (le nombre de nouveaux cas) d’IST augmentait avec un taux de dépistage qui faiblissait, en particulier chez les personnes de moins de 26 ans[2].

Les IST concernées par ce nouveau dispositif sont l’infection génitale à Chlamydia trachomatis et à gonocoque, la syphilis et l’hépatite B. La mesure avait été annoncée en septembre 2022 et inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023.

Des groupes de travail, pilotés par la Direction Générale de la Santé, se sont mis en place pour élaborer un plan de dépistage calqué sur le modèle du VIH Test, qui est un succès à la fois dans l’organisation et dans l’efficacité épidémiologique. Le groupe de travail pluridisciplinaire comprenaient des experts médicaux, des associations de terrain, des membres des CeGIDD (Centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic), des COREVIH (Comité de Coordination Régionale de Lutte contre les IST et le VIH), et des tutelles comme la DGS et la CNAM. Les biologistes médicaux étaient représentés par des membres des syndicats représentatifs ou des URPS. Le travail était immense, beaucoup plus large que VIH test. Il fut décidé de dépister les quatre principales IST en plus du VIH. Pour les infections génitales à Chlamydiae et Gonocoque, il y avait la nécessité d’un prélèvement non sanguin : le choix a été fait de privilégier l’auto-prélèvement pour des raisons d’acceptabilité du dépistage à performance biologique équivalente. Il s’est posé également le problème du recueil des renseignements cliniques indispensables, du consentement, de la confidentialité des données ou encore de l’annonce en cas de résultat positif. Néanmoins, La difficulté la plus grande est venue de la définition de parcours de soin d’aval des cas positifs en l’absence de médecin prescripteur. Pour le programme VIH Test, les structures d’aval prenant en charge les primo-infections sont très efficaces, balisées et formées comme telles. Pour l’hépatite B, ces mêmes structures assurent des prises en charge de qualité. En revanche, pour les IST bactériennes entrant dans le périmètre du programme, le parcours d’aval est plus complexe. C’est précisément une question que nous travaillons en groupe de travail avec l’ARS et l’Assurance maladie.

Le dispositif a connu un succès immédiat, qui a surpris l’ensemble des acteurs du programme. Il est vrai que Mon IST Testa bénéficié d’un relais médiatique important dans la presse et les médias qui a participé à l’information du public ciblé. L’Assurance maladie a accompagné efficacement le démarrage du programme à la fois grâce à l’information des professionnels de santé impliqués, mais aussi en effectuant les paramétrages informatiques idoines permettant une prise en charge totale et sans avance de frais.  Les LBM avaient déjà l’expérience grâce au VIH Test et ont pu assurer au quotidien ce qu’on peut appeler un succès. Sans que ce soit une surprise, le seul point qui reste à améliorer est la prise en charge rapide des cas positifs dépistés d’infection bactérienne (syphilis, chlamydia, gonocoque). La crainte des acteurs est de voir « s’évaporer » les « perdus de vue » porteurs d’infection, car en matière d’IST, autant que possible, les « traitements minute » d’antibiotiques sont privilégiés.

Comme évoqué plus haut, la perspective immédiate est le balisage du parcours de soins de la personne dépistée positive grâce aux acteurs de la lutte contre les IST que sont les CeGIDD, les COREVIH, les associations de terrain et les professionnels de ville.

À moyen terme, les perspectives sont à envisager à la lumière des déterminants qui ont fait de cette opération un succès :

  • Maladie fréquente, transmissible avec enjeu épidémiologique fort
  • Pluridisciplinarité et engagement des groupes de travail
  • Vu du public, accessibilité du programme (proximité, gratuité, disponibilité)

[1] Pour aller plus loin, voir le bulletin publié le 11/10/2024 par SPF : VIH et IST bactériennes en France. Bilan 2023


[2] Depuis le 1er janvier 2022, l’accès au dépistage du VIH dans les laboratoires de biologie médicale est possible sans ordonnance, sans avance de frais et sans rendez-vous.

Auteur : CPAM de Paris